Date de publication

7 mars 2022

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La hernie discale dont les symptômes vont de la simple douleur à la paralysie complète, est une affection commune chez le chien. Elle affecte plus particulièrement certaines races de chiens, dites chondrodystrophiques comme le teckel mais peuvent être aussi observées dans d’autres races.

Qu’est ce qu’un disque intervertébral ?

Les disques intervertébraux sont des structures déformables  qui se situent entre les corps vertébraux de deux vertèbres adjacentes, structures osseuses qui elles, sont peu déformables. Ces disques jouent donc un rôle fondamental dans l’absorption des chocs. Le disque est formé de deux parties, le noyau pulpeux et l’anneau fibreux, dont la contribution à l’amortissement des chocs est différente.

L’anneau fibreux situé en partie périphérique est constitué de faisceaux parallèles et longitudinaux de fibres de collagène,  organisation permettant une certaine souplesse et surtout une très grande solidité de l’union des corps vertébraux.

Le noyau pulpeux, quant à lui est formé un gel constitué de glycoprotéines, de protéoglycanes et de collagène de type 2. Cette structure riche en protéines créant un important appel d’eau rend le noyau incompressible.

Dégénérescence discale et hernie

Les capacités d’absorption du choc dépendent despropriétés à capter l’eau du noyau, de l’intégrité et de l’élasticité de l’anneau. Elles  peuvent être diminuées avec l’âge ou par d’autres changements dégénératifs qui précèdent souvent le phénomène de hernie discale.

Il existe deux types de dégénérescence du disque intervertébral chez le chien.

Le premier type de dégénérescence affecte principalement les chiens de races chondrodystrophiques (*) de façon précoce puisqu’elle apparaît durant les deux premières années de vie. La dégénérescence concerne tous les disques intervertébraux le long de la colonne, de façon plus ou moins intense selon les disques. Elle est caractérisée par une déshydratation du noyau pulpeux qui  au fur et à mesure du temps est envahi par du cartilage et présente des calcifications dont l’incidence augmentent avec l’âge.

Ces altérations rendent le disque moins apte à amortir les chocs et ce chez des animaux jeunes donc très actifs sur le plan physique. Le noyau pulpeux ne jouant plus son rôle d’amortisseur, les fibres de l’anneau fibreux perdant leur élasticité finissent par se rompre conduisant ainsi à une hernie discale de type I.

Le second type de dégénérescence affecte toutes les autres races de chien, certaines comme le Berger Allemand y étant plus prédisposées. Cette dégénérescence en rapport avec le vieillissement de l’animal,  se traduit par une déshydratation du noyau qui est par la suite envahi par du fibrocartilage. L’anneau fibreux qui dans le même temps perd ses propriétés élastiques, surtout au niveau des couches profondes se fragilise peut se déchirer partiellement sous l’effet d’une contrainte biomécanique et laisser passer le noyau pulpeux. Cette dégénérescence contrairement aux races chondrodystrophiques débute plus tardivement, chez des chiens de plus de 7 ans et n’affecte souvent qu’un nombre limité de disques, un ou deux. De plus les calcifications sont très rares.

Ces deux types de dégénérescence peuvent conduire à l’apparition de deux types de hernies discales :

La hernie discale de type I, aussi appelé Hansen I consisteen une extrusion du noyau pulpeux suite à une rupture totale de l’anneau fibreux. Ce premier type de hernie apparaît le plus souvent de manière aiguë et touche en majorité les races chondrodystrophiques  mais  peut également toucher les autres races de chien ayant une forte activité sportive dont la moelle épinière est soumise à de fortes contraintes ou encore lors de traumatismes.  La hernie discale de type II, ou Hansen II correspond à une protrusion du disque suite à une rupture partielle de l’anneau fibreux. Suite à cette rupture le noyau pulpeux s’insinue dans une brèche de l’anneau, ce qui crée un bombement à l’origine de la protrusion et du rétrécissement du canal vertébral. Ce type de hernie touche plus particulièrement les grandes races de chiens non chondrodystrophiqueset évolue habituellement de manière chronique.

Signes cliniques

Les symptômes dépendent du site de la hernie discale et du degré de compression de la moelle épinière. Le degré de gravité de l’atteinte médullaire est  évalué selon la classification suivante :

  • Stade 1 : douleur sans déficit neurologique
  • Stade 2 : douleur récidivante et/ou déficit proprioceptif.

L’animal présente une ataxie, une parésie ambulatoire caractérisée par des réactions posturales anormales, une démarche incoordonnée. La sensibilité douloureuse est conservée et la continence urinaire et fécale de même.

  • Stade 3 : parésie non ambulatoire

Il s’agit d’une perte incomplète des mouvements volontaires. La sensibilité douloureuse est conservée et la continence urinaire et fécale de même.

  • Stade 4 : paralysie avec nociception conservée.

Il y a une perte complète des mouvements volontaires mais la sensibilité douloureuse est conservée. En revanche il y a souvent une incontinence urinaire et/ou fécale

  • Stade 5 : paralysie sans nociception

Il y a une perte complète des mouvements volontaires associée à une perte de la sensibilité douloureuse accompagnée d’une incontinence urinaire et/ou fécale

Diagnostic

A l’examen clinique sera associé un examen neurologique complet ainsi  que des examens complémentaires  de type imagerie.

Une radiographie sans préparation
 pourra donner des informations permettant de suspecter une   hernie discale : rétrécissement de l’espace intervertébral en comparaison des espaces adjacents, minéralisation et déplacement du matériel discal dans le canal vertébral… Une myélographie
 consistant en une injection de produit de contraste dans l’espace sous-arachnoïdien sera nécessaire pour confirmer la hernie et en déterminer la localisation exacte ainsi que le degré de compression médullaire qu’elle occasionne. D’autres techniques d’imagerie médicale comme le Scanner et l’IRM peuvent être utilisées en complément de la myélographie, pour confirmer ou affiner le diagnostic.

Les traitements

Le choix du traitement dépendra du stade. Il sera hygiénique, médical et/ou chirurgical.

Si l’animal ne présente que de la douleur et n’a pas de signes de paralysie, un traitement hygiénique et médical peut suffire.

En revanche en cas de signes de paralysie, le traitement de choix reste chirurgical, l’objectif étant d’éviter que la compression de la moelle ne s’accentue et que les lésions ne deviennent irréversibles.

Ainsi dans les premiers (stades 1 et 2 voire 3), un traitement associant repos strict, anti-inflammatoires / antalgiques peut être proposé.

Un repos strict pendant plusieurs semaines, idéalement un confinement dans une cage, est nécessaire pour permettre une cicatrisation et éviter toute aggravation de la lésion. Il faut y associer  un nursing de l’animal afin de limiter l’apparition d’escarres et permettre la vidange vésicale si besoin.

Les anti-inflammatoires classiquement utilisés peuvent être associés à des antalgiques agissant exclusivement sur les douleurs d’origine neuropathique, ou à des dérivés morphiniques.

A partir du stade 3  et lors de douleurs chroniques et ou récidivantes, la décompression chirurgicale est fortement recommandée. En cas de hernie discale de stade 5, avec perte de nociception, la décompression chirurgicale doit être réalisée en urgence, chaque heure écoulée diminuant considérablement le pronostic de récupération. Au delà de 48h, ce dernier est évalué à moins de 5%.

Place de l’ostéopathie dans l’arsenal thérapeutique du vétérinaire

Qu’ils sont les phénomènes qui aboutissent à une hernie discale du point de vue ostéopathie ?

La hernie discale peut être considérée comme le résultat d’un report de lignes de forces corporelles inadéquat qui aboutit à la compression du disque qui dégénérant finit par perdre son élasticité (Patrick Chêne. Osteo4pattes N°11).  L’approche globale de l’ostéopathie présente l’avantage de ne pas se limiter à l’aspect  local du problème mais de s’intéresser à l’ensemble de l’organisme ce qui permet de détecter et corriger des dysfonctions ostéopathiques  souvent très éloignées du site présentant la lésion qui motive la consultation mais qui peuvent en être.

Si ces forces de tension anormales ayant abouti à la hernie ne sont pas corrigées, non seulement la cicatrisation ne peut pas se faire dans de bonnes conditions mais la récidive est fortement probable.

Nous comprenons  donc aisément la complémentarité d’une approche ostéopathique avec l’approche allopathique et chirurgicale.

Si la chirurgie reste le traitement de choix lors de hernie avérée ou bien lors d’un début de paralysie, la combinaison d’une approche médicale, chirurgicale et ostéopathie dès les premiers stades de hernie prend tout son sens.

L’objectif de la prise en charge ostéopathique de la hernie discale consiste à traiter les différentes dysfonctions ayant aboutit à l’installation de forces de tension anormales au niveau de l’espace intervertébral afin de rétablir un équilibre des tensions au niveau de l’articulation et donc de la stabiliser. Cette stabilisation permettra une meilleure vascularisation et une meilleure circulation de l’information nerveuse, créant ainsi un micro environnement favorable à la stabilisation du disque,  à sa cicatrisation et à son repositionnement.

L’acte ostéopathique peut donc se concevoir selon deux approches

Une approche curative, en l’associant d’emblée au traitement hygiénique et médical dans la prise en charge des hernies de type 1, 2 voire 3.

Une approche préventive: 

  • après la prise en charge médicale et/ou chirurgicale de la hernie afin de corriger les tensions qui ont pu favoriser la hernie et en mettant en place un suivi ostéopathique régulier de ces animaux afin de limiter les risques de récidives
  • chez la races prédisposées comme les races chondrodystrophiques, la mise en place d’un suivi ostéopathique précoce de ces animaux permet de limiter les risques de hernie en corrigeant régulièrement les tensions corporelles pouvant à terme aboutir à une hernie discale.

Bibliographie

* La chondrodystrophie désigne tous les troubles de l’ossification endochondrale ainsi que les perturbations de la chondrogenèse. Il peut s’agir d’altérations d’origine génétique, vasculaire, endocrinienne, mécanique ou métabolique et qui ont une répercussion sur la croissance en longueur des os.

Officiellement on ne recense que 4 races chondrodystrophiques : le Teckel, le Caniche nain, le Pékinois et le Beagle. Cependant les auteurs associent couramment d’autres races à ce groupe : le Shi-Tsu, le Lhassa Apso, le Bouledogue français, le Cocker Spaniel…